SUITE A LEUR FIN

J'ai reçu les confidences de la femme de ménage du service médical du parti socialiste.

Sous couvert du respect de son anonymat le plus strict, elle m'a déclaré, pour que je ne le répète à personne :

"Le professeur qui dirige le service, avec toute la compétence qui lui est reconnue à l'unanimité, est très inquiet de l'afflux des ex- membres de la Nomenclature qui, n'ayant pu se recaser dans un emploi fictif dans une mairie complaisante, sont livrés à eux-mêmes. Ils tombent rapidement dans une dépression sévère, n'ayant aucune des qualités permettant habituellement de retrouver un poste dans la fonction privée. Le monde du travail n'a pas de place pour des irresponsables ayant fait leurs preuves. Ils seraient même dangereux pour leurs collègues restés au sol aux commandes d'une grue ou dans les profondeurs d'un puits de pétrole. Jusqu'à présent, le professeur n'avait été confronté qu'à des problèmes de sur-poids pour les politiciens socialistes promus à un rang ministériel. Dans les 3 mois qui suivent leur entrée dans les cabinets, ils et elles voient leur tour de taille augmenté, leur faciès s'alunir et leur glycémie et cholestérol franchir les bornes légitimes. Les limites allègrement dépassées dans des proportions considérables les font tomber dans l'hypertension, le diabète surgras, et l'athéromatose galopante. L'hépatologue du département de la gastro-colite a eu à traiter quelques cirrhoses foudroyantes. Débarrassés des taches ministérielles par des fonctionnaires zélés en place depuis toujours et peu désireux de partager le pouvoir, ils et elles pouvaient se livrer à plein temps à un régime gastronomique concocté par des chefs étoilés que les tables du monde entiers nous envient. A cela, il faut malheureusement ajouter des caves remplies de premiers crus classés dans le Bordeaux et la Bourgogne et des magnums millésimés venant de la Champagne. Même un antialcoolique aurait eu du mal à résister. Pour leur excuse , ils  n'ont pas conscience, quand ils entrent dans le vif du pouvoir et qu'ils quittent la minable cantine de leur ex-siège social ou la peu appétissante cafète du palais Bourbon qu'ils et elles vont être confrontés à des tentations dont leur soif de revanche et leur appétit des honneurs n'allaient pas les mettre à l'abri.

Le professeur avait beau les avertir, ils et elles étaient dans le déni et, maintenant, malheur est bon, sans leurs indemnités, ils et elles vont maigrir,  pour leur meilleure santé.

Attention, tous ne sont pas suicidaires. Les politiciens de haut vol passent facilement du bien public au privé. Ils y défendent les mêmes intérêts: les leurs. Ils n'ont rien à changer:ni le vocabulaire, ni la rhétorique, ni la force de conviction. Il s'agit d'avoir un plan d'avance, une stratégie gagnante, une ferme volonté, de savoir résister à la concurrence (hier l'opposition), de présenter un bon bilan, de faire des économies, de décentraliser les postes de décision, de ne pas se laisser rebuter par les difficultés, de mettre en valeur tous les potentiels, de tenir les promesses aux actionnaires, aux investisseurs, de rembourser la dette et de ne pas se laisser abattre par une conjoncture défavorable afin d'attendre, avec sérénité, le retour sur investissement. Cependant - c'est la femme de ménage qui parle - les connaissant bien pour les avoir côtoyer dans les couloirs, je me méfierai si j'étais la DRH de la société qui les a embauchés. Ce sont des beaux parleurs, champions du double langage, des contre-vérités, habitués des promesses non tenues, spécialistes de projets toujours avortés, fabricants de mensonges sur mesure, incapables du travail d'équipe, d’œuvrer pour le long cours, de préparer l'avenir. C'est seulement si la société a besoin de financements occultes, de dessous de table, de blanchiment, d'évasion fiscale, de retournement de veste qu'elle pourra rentrer dans ses frais ou être trahie à la dernière minute."

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