Ce blog est pour le lecteur qui apprécie l'ironie, l'humour, qui est à l'affût de pensées faciles, d'idées saugrenues, d'inventions bidon, de conseils bizarres et qui n'est pas horrifié par le sarcasme, l'irrespect. Il est à éviter pour les conformistes, les dominants, les dominés.


vendredi 9 mars 2018

MON POMMIER

C'est une longue histoire d'amour. Je l'ai planté, il y a longtemps, quand j'étais jeune et lui aussi. Il a grandi plus haut et vite que moi. Très tôt, il m'a régalé de belles et bonnes pommes, à l'ancienne, juteuses, fruitées, parfois habitées, jamais à jeter. L'été, il me faisait de l'ombre, m'abritait de la pluie. Hospitalier, il hébergeait les oiseaux, leurs nids, les coccinelles, les araignées. Pour porter bonheur,  il portait du gui. Jamais un mot de trop quand je lui en faisais voir de toutes les couleurs avec du blanc de chaux sur le tronc, de la bouillie de Bordeaux sur la ramure, lui faisait une taille sévère, à la fin de l'hiver pour qu'il reparte d'un bon pied.

Avec le temps, il a fini par se fatiguer de tant donner et de recevoir la pluie, le froid, la neige, la grêle, d'être trop accueillant aux champignons, aux parasites, il s'est mis à dépérir, à faire du bois cassant, à perdre ses feuilles, ses fruits, à faire moins d'ombre.

J'ai bien senti qu'il s'en allait. Pour qu'il ne se laisse pas abattre un jour de grand vent, par une méchante risée, lui, le fier, l'orgueilleux, lui qui n'était pas un roseau mais de la race des chênes, pas du genre à plier le genou, j'ai du me résoudre à m'en séparer, avant qu'il ne pourrisse sur pied. Je l'ai mis en bûches et, une fois sec, il aura droit à une crémation, avec les honneurs.

En fait, il n'est pas mort, il m'a donné beaucoup de petits greffons et, dans mon verger, il y a une forêt de jeunes pommiers qui lui ressembleront et qui, je l'espère, feront pour moi ce que j'ai fait pour lui.
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